Pour la première fois, j'ai envie de parler de la maladie de mon papa.
Il a travaillé toute sa vie, depuis l'âge de 14 ans, sans vraiment prendre de vacances. Sa devise : travailler, travailler et encore travailler. Je me souviens des mercredis et tous les week-ends que je passais dans l'atelier de mon père. J'y faisais un petit meuble pour mettre dans ma chambre, puis une grosse boite en boite sous laquelle j'amais mis des roulettes pour emmener des affaires dans le jardin... Grâce à lui, j'ai su très tôt planter des clous, scier des bouts de bois, travailer avec soin... En un seul, savoir bricoler !
Un an après sa retraite, ma maman me disait qu'elle ne comprenait pas ce qui se passait. Mon père commençait à faire des erreurs : un carrelage posé pas aussi plat qu'avant, des planches coupées trop courtes, des trous de mortaises faites au mauvais endroit... Il disait que le nettoyeur haute-pression de marchait plus. En fait, il ne l'avait pas raccordé au robinet.
Ce qui me fait le plus mal au coeur, c'était de voir mon papa qui ne savait plus mettre son pull à l'endroit, il sortait de la maison mais ne savait plus y rentrer, il s'asseyait à l'arrière dans la voiture et disait qu'il ne trouvait plus le volant, il se mettait en colère de plus en plus souvent. Le souvenir le plus marquant pour moi, c'était lors du premier repas de noël (malade). Nous étions tous les trois, mes parents et moi-même. On avait mangé l'entrée et maman est partie dans la cuisine chercher la suite. Et là mon père me dit :"On est bien tous les deux. Je ne sais pas si maman viendra aujourd'hui ?". J'ai eu les jambes coupées, j'ai dû devenir toute blanche. Maman est arrivé à la table et j'ai dit à mon père : "Tu vois, il ne fallait pas t'inquiéter. Ta Chérie vient d'arriver pour manger avec nous." Et il me répond : "Oh, qu'est-ce que je suis content." Ca fait plus de 5 ans maintenant, mais ça me bouleverse toujours autant.
Depuis, il est en maison médicalisée. Il a de l'ostéoporose à plus de 80 %. Ce qui implique qu'il est complétement raide, il est alité, il ne me reconnait plus, il ne parle plus, on lui fait sa toilette, on le fait manger... J'aime pas le voir comme ça. Je vais le voir tous les dimanches avec ma maman. On lui parle comme s'il comprenait, on discute toutes les deux de choses et d'autres.
Toutes les aides soignantes qui se sont occupées de mon père, à la maison ou en domaine hospitalier, elles l'ont toutes trouvée attachant. Même s'il ne parle plus, son visage change selon telle ou telle personne. Je me souviens que l'une telle parlait "séchement" et il faisaint la grimace quand elle arrivait dans la pièce. Quant à une autre, Christine, il adorait chanter avec elle (au début, il le pouvait).
La suite un autre jour.
